e) Groupe 5 : monnaies de récompense de gestes vertueux

Début des années 2000, afin de modifier certaines pratiques en récompensant les bons gestes par la distribution d’un pouvoir d’achat, affecté à des usages compatibles avec l’objectif poursuivi.

 

Convertibilité externe possible

 

Ces expériences sont liées à des politiques publiques même si elles peuvent venir d’organisations tierces. Cherchant à établir un partenariat avec une ou des collectivités.

 

A Rotterdam dans le cadre de son Agenda 21 local, selon le fonctionnement d’une « carte de fidélité » en cumulant des points sur une carte à puce lors d’achats de produits et de services en phase avec les objectifs.

 

Ces systèmes sont peu nombreux car lourds à créer et faire fonctionner.

 

f) Groupe 6 : Crédit mutuel interentreprises

Ce sont des chambres de compensation destinées à soutenir l’activité des adhérents en leur fournissant un accès facilité au crédit en unité de compte interne et à des taux très faibles.

 

Non convertibilité en monnaie nationale : au service d’une communauté d’acteurs professionnels.

 

  • Exemple de la Banque coopérative WIR en Suisse en 1934 (Elle introduit la convertibilité entrante)
  • Le RES en Belgique (1996)
  • Le Sardex en Sardaigne (2009)

 

La dimension alternative est parfois floue car les entreprises membres ont d’abord pour objectif d’accéder à des facilités de trésorerie (CT) et d’optimiser leurs stocks.

 

3) La dynamique des monnaies alternatives

Si les monnaies alternatives ont en commun une dynamique associative, elles n’ont pas suivi une trajectoire unique d’émergence et de diffusion ; c’est ce que nous montre la variété des 6 groupes présentés (le 7° étant traité à part, infra).

 

Cette variété est issue d’un processus de multiplication et de différenciation qui a pris quatre formes :

  • Une dissémination très ouverte permise par l’émergence de l’internet dans les années 1990 (ce serait encore plus vrai pour le groupe 7) :
  • Un essaimage souple : les expériences sont autonomes mais reliées par des principes communs (cf. typologie), parfois formulés dans des chartes qui n’interdissent pas les adaptations et les évolutions
  • Parfois c’est un essaimage en franchise où une structure fondatrice contractualise avec des dispositifs locaux, ou des dispositifs locaux mutualisent des moyens (plateforme informatique)
  • Plus rarement un développement centralisé où un modèle unique est décliné sur un territoire (groupe 6 Sardex)

 

Ces dispositifs se différencient en se diffusant du fait de l’adaptation aux conditions locales, et par le retour de l’expérimentation.

 

De manière globale, les monnaies alternatives :

  • Apparaissent souvent dans un contexte économique et social difficile
  • Suivent un modèle de diffusion (courbe logistique) : en cas de succès, il y a essaimage vers de nouveaux pays (période de deux à quatre ans pour cette phase de développement accéléré)
  • Une période de tassement voire d’abandon : il ya un rapport étroit avec un public militant : motivation déception, désillusion. Il ne faut pas négliger la possibilité de redémarrage avec le renouvellement de militants et/ou d’adhérents.
  • Ce sont aussi des aléas extérieurs qui peuvent expliquer les mouvements : en Argentine, la crise accélère le succès du Trueque, avant une chute du dispositif dès la mise en place d’aides par le gouvernement.

 

B. Un regard sur les expériences de monnaies alternatives

 

1) Le cadre d’analyse des monnaies alternatives

Pour analyser les monnaies alternatives, il semble difficile de se contenter des références exclusives aux approches de la seule science économique (§1 et §2 de ce thème) : la monnaie comme un actif liquide par excellence, créée à l’occasion d’opérations de crédit bancaire n’épuise pas le sens.

 

C’est important mais cela laisse échapper des aspects :

  • Les monnaies alternatives sont parfois créées en dehors d’un cadre souverain, parfois contre lui
  • Les monnaies alternatives ne relèvent généralement pas du système bancaire hiérarchisé (même si les questions de convertibilité entrante/sortante les y rattachent)
  • Elles ne permettent pas de réduire les coûts de transaction ; au contraire, elles les accroissent ce qui semble irrationnel du point de vue économique seul

 

Elles seraient donc irrationnelles d’un point de vue économique et elles ne seraient pas de la monnaie puisqu’elles seraient hors cadre bancaire et souverain.

 

Cela appelle à considérer la monnaie comme un institution sociale, prenant une variété de formes et de sens en fonction des sociétés, indissociable d’un stylème de valeurs.

 

Remarque : ces analyses de la monnaie ne sont en fait pas nouvelles : on n’a pas attendu les monnaies alternatives pour les prendre en compte…