La relative stabilité du change obtenue entre pays européens a favorisé le développement des échanges intracommunautaires
Les efforts faits par les différents pays membres ont permis d’obtenir une relative stabilité des changes entre monnaies européennes : certes il y a eu de nombreuses modifications de parité (pas moins de 17 entre 1979 et 1994) mais elles ont été concertées et surtout leur ampleur a été limitée par rapport aux fortes variations des autres monnaies, en particulier de celles du dollar et du yen.
Cette stabilité a favorise les échanges (=> gain à l’échange) à l’intérieur du marché unique : la relative stabilité monétaire a réduit l’ampleur des coûts improductifs liés à l’instabilité monétaire (recherche de l’information et surtout coûts de couverture) et a contribué à l’unification du marché intérieur.

Le défaut majeur : une double dépendance qui joue contre la croissance

1er problème (interne à l’Europe) : la dépendance vis-à-vis de l’Allemagne
La monnaie de référence sur laquelle se calent les autres pays et vers laquelle se reportent les opérateurs, en cas de doute, c’est le mark. Compte-tenu de la solidité économique de la RFA, le système fonctionne donc comme une zone mark. La RFA n’a pas à défendre son taux de change ; sa politique monétaire est autonome.
Les autres pays sont obligés de suivre les décisions allemandes. C’est ce qui se produit au début des années 1990 lors de la réunification (énormes investissements à financer). L’Allemagne ne veut ni recourir à la création monétaire ni trop hausser les impôts. D’où le recours à l’épargne internationale. Pour cela, elle doit hausser ses taux d’intérêt. Les autres pays, en particulier la France, sont obligés d’augmenter leurs propres taux d’intérêt avec de néfastes conséquences.
Nota : il faut préciser que les autres États européens ont considéré que la réunification allemande et son financement étaient un problème interne, la laissant seule en supporter le coût…

2ème problème (plus général, lié au premier) : la dépendance vis-à-vis des marchés financiers
Les opérateurs, sur les marchés de capitaux, sont conscients de ces difficultés et, par conséquent, redoutent un abandon des politiques de stabilité de la part des pays les plus fragiles (politiques non crédibles du fait d’incohérence temporelle dans la conduite de celles-ci). Ils ont en tête l’expérience du serpent monétaire européen et les revirements de politique en France en particulier.
Ainsi, chaque fois que les opérateurs anticipent  – à tort ou à raison -  le reniement par un gouvernement, de sa politique de rigueur, ils se débarrassent hâtivement de la monnaie correspondante pour se reporter sur des monnaies plus solides (spéculation), ce qui provoque de l’instabilité monétaire.
On constate donc que l’existence du SME ne règle pas le problème de la fragilité de certaines monnaies : les monnaies les plus faibles restent exposées à des crises spéculatives. Elles sont en permanence « sous la pression des marchés», exposées à leurs jugements incertains et parfois même contradictoires. La charge de la stabilité pèse exclusivement sur elles (ajustement interne : rigueur). Elles ne peuvent pas compter sur la coopération des autres pays. (Le FECOM aide à surmonter des crises de change ponctuelles mais il ne règle en rien la fragilité chronique d’une monnaie due à des faiblesses structurelles [compétitivité insuffisante]). (cf. théorie des choix de portefeuille, bulles mimétiques de Keynes, non crédibilité de politiques de rigueur pouvant faire l’objet d’incohérence temporelle.
Les spéculateurs, grâce à la règle précise de la marge de fluctuation des 2,25 %, peuvent anticiper à partir de quel moment une banque centrale va intervenir, ce qui limite leurs risques de perte. En 1993, alors que la marche vers l’euro est déjà lancée, les membres du SME vont dans un coup de génie désarmer la spéculation en décidant de porter la marge de fluctuation à (+/- 15%) pour rendre imprévisibles les interventions des banques centrales. Officiellement, le SME est fragilisé (quasi-changes flexibles). En fait, c’est le contraire : grâce à ce palliatif, les banques centrales continuent de respecter l’ancienne marge, tout en brouillant les cartes pour les spéculateurs. Mais le problème majeur demeure : l’obligation de politiques rigoureuses (« rassurance » des marchés), ce qui joue contre la croissance et l’emploi.

Au total, c’est parce qu’il y a pluralité des monnaies européennes que les opérateurs peuvent spéculer. Ce constat, à l’époque, renforce la position des partisans de la monnaie unique : il faut arriver à ce qu’il n’y ait plus qu’une seule monnaie, ce qui rendra ce type de spéculation impossible, donc redonnera de l’autonomie à la politique monétaire remise en partie au service de la croissance et de l’emploi.

Enseignements pour notre thème :

  • L’action monétaire doit être la plus coopérative possible (SME > Serpent
  • Une monnaie commune ne pourrait pas empêcher la spéculation entre monnaies mais au contraire l’accroître : à méditer par rapport aux positions entendues ici ou là


b) La mise en place de la monnaie unique : l’euro (1999)

En 1988, le Conseil Européen (chefs d’Etat et de gouvernement) charge un comité, présidé par J. Delors, ancien ministre des finances du gouvernement Mauroy et alors président de la Commission de la CEE, de proposer un plan conduisant par étapes à une véritable union économique et monétaire.
En 1989, le rapport Delors propose la mise en place d’une union monétaire en plusieurs étapes, par un rapprochement progressif des économies des pays membres (convergence) permettant finalement l’adoption d’une monnaie unique, se substituant aux différentes monnaies nationales.
Ce rapport sert de base aux négociations intergouvernementales qui aboutissent aux accords de Maastricht, en décembre 1991, lesquels débouchent sur la signature du traité de Maastricht, en février 1992, lequel est ensuite ratifié par les différents pays au cours des années 1992 et 1993.

Typologie des niveaux d'intégration économique
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