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Complément sur le Grand marché - le marché unique des produits agricoles : la reforme de la PAC (1992)


1. Les défauts de la PAC

A la fin des années 1980, on fait plusieurs critiques à la Politique Agricole Commune

- Critiques internes à la Communauté Européenne :

  • Critiques économiques :

o La PAC pousse à la surproduction permanente : en accordant aux producteurs un débouché garanti de leurs produits, elle les incite à produire au delà de ce que peut absorber la demande (excédents).

o La PAC suppose des aides croissantes pour arriver à maintenir le niveau de vie des agriculteurs :

o La surproduction pousse à la dégradation des prix, ce qui oblige à consacrer une partie importante du budget européen, déjà insuffisant, au soutien des prix agricoles – mesure improductive - au détriment d’autres dépenses

o La PAC repose sur des prix élevés, ce qui pénalise les consommateurs.

  • Critique sociale : inégalités entre agriculteurs. Le mécanisme d’aide (aide au produit et non au producteur) est inégalitaire : plus on produit, plus on touche des aides, ce qui avantage surtout les gros producteurs (20 % des agriculteurs reçoivent 80 % des aides). Certains produits sont très aidés (céréales, lait), d’autres pas du tout (ex : viticulture)

 

- Critiques externes : la pression des Etats-Unis

  • Les Etats-Unis, au fort potentiel d’exportation de produits agricoles, se heurtent au protectionnisme européen (prélèvements à l’importation, restitutions à l’exportation). Ils font valoir que ces mécanismes sont contraires aux principes du GATT, se gardant bien de reconnaître que les agriculteurs américains, également, sont aidés (« deficiency payments »).
  • La négociation de l’Uruguay round, dans le cadre du GATT, où le dossier agricole bloque les discussions pendant six ans, est l’occasion pour la Communauté européenne de réformer son dispositif.

2) La réforme de 1992

- Le volet économique :

  • L’objectif : limiter les excédents, ramener progressivement les prix UE (hauts) au niveau des prix mondiaux (bas).
  • Deux moyens :

o Action sur les quantités : Réduction des surfaces cultivables par mise en jachère obligatoire de 15 % de la surface cultivée pour les principales cultures (céréales, oléagineux, …). On remarque l’inversion du mouvement commencé il y a deux siècles : la Révolution agricole, qui a mis un terme aux phénomènes de pénurie alimentaire, s’est faite par la suppression de la jachère (révolution de l’azote).

o Action sur les prix : baisse de 30 % pour les céréales, de 15 % pour la viande, sur trois ans. On compte ainsi gagner en compétitivité-prix de manière à pouvoir se passer du dispositif protectionniste.

- Le volet social : Les aides aux agriculteurs sont maintenues, en les liants aux efforts de réduction de la production (jachère).

 

Cette réforme permet le déblocage du dossier agricole dans les négociations du cycle de l’Uruguay, ce qui permet d’aboutir à un accord général (décembre 1993)

 

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B. L’unification monétaire européenne

1) Le système monétaire européen (SME, 1979-1999)

En 1979, les pays de la CEE adoptent un système monétaire qui leur est propre : le Système Monétaire Européen (SME). C’est le prolongement du système mis en place en 1972 par l’accord de Bâle (le « serpent monétaire européen»).

a) Présentation du SME

1/ L’orientation générale

Rappel : avec l’Accord de Bale (1972, le Serpent monétaire européen [213.33]), les pays membres de la CEE se sont imposé des règles de stabilité du change entre leurs monnaies (régime de change fixe) afin que le « marché commun » puisse fonctionner malgré le contexte de forte instabilité monétaire qui se développe au plan mondial.

 

Atteindre une telle stabilité du change implique le respect prioritaire des objectifs de stabilité des prix (désinflation) et d’équilibre extérieur (BTC), donc une politique avant tout de stabilité, voire de rigueur).

Avec la crise naissante et les entrées et sorties du Serpent, les déconvenues de ce système conduisent, en 1979, à mettre en place un système que l’on veut mieux adapté à la situation : le SME (Système Monétaire Européen). Il a un objectif de change plus réaliste et prévoit des mécanismes de coopération entre États membres.

2/ Le dispositif : une coopération monétaire en progression

a/ On utilise la monnaie commune existante : l’ECU (« European Currency Unit »)

Dès 1969, l’ECU avait été créé comme une simple unité de compte commune utilisée pour chiffrer certaines opérations entre pays membres, en particulier celles qui étaient liées au fonctionnement de la PAC. Cette monnaie ne remplissait donc qu’une seule des trois fonctions d’une monnaie (simple instrument de mesure de la valeur).

En 1979, on étend le rôle de l’ECU : sa fonction d’instrument de mesure, c’est-à-dire d’unité de compte, est renforcée : il devient la base de calcul des taux de change des monnaies européennes entre elles.

  • La valeur de l’ECU est une moyenne pondérée de la valeur des différentes monnaies européennes : c’est une monnaie composite, ou monnaie-panier.
  • Le taux officiel d’une monnaie (son « taux-pivot ») est exprimé en ECU.

En outre, les banques centrales participant au SME peuvent désormais utiliser l’ECU, à côté des monnaies nationales, pour leurs règlements entre elles et pour constituer leurs réserves monétaires.

b/ Un régime de changes fixes [113.121] mais ajustables

* Le taux de change sur le marché doit rester dans une bande de fluctuation de + / - 2,25 % : réalisme et ambition

Au sein du SME, une monnaie, sur le marché des changes, doit se maintenir à l’intérieur d’une bande de fluctuation (ou marge de fluctuation) de + / - 2,25 % par rapport à son taux officiel (taux pivot).

C’est un objectif réaliste : la marge étroite de + / - 1,125 % adoptée à Bâle en 1972 s’est avérée trop difficile à respecter pour la plupart des pays concernés. Avec le SME, on adopte donc une marge deux fois plus large. De plus, à titre provisoire, on adopte un dispositif encore moins exigeant pour certaines monnaies fragiles (lire, livre).

C’est en même temps un objectif ambitieux : alors que, au plan mondial, on a cédé aux facilités des changes flexibles (flottement des monnaies en mars 1973, officialisé par les accords de la Jamaïque, en 1976), et que l’instabilité monétaire est très forte, les Européens, eux, se donnent un objectif exigeant de stabilité monétaire, avec les contraintes que cela suppose sur la régulation interne de leur économie (exigence de stabilité des prix, d’équilibre extérieur, de taux d’intérêt suffisamment élevés pour être attractifs).

 

Pour y parvenir, on renforce un instrument de coopération déjà existant : le FECOM.

En 1973, au moment de l’abandon des changes fixes au niveau mondial, les pays européens avaient créé le FECOM (Fonds Européen de Coopération Monétaire), chargé de venir en aide aux pays éprouvant des difficultés à maintenir leur monnaie dans la marge de fluctuation. Le FECOM, à l’origine, était simplement chargé de coordonner la coopération bilatérale qui existait de Banque Centrale à Banque Centrale.

En 1979, on décide de renforcer le rôle du FECOM en en faisant un instrument de coopération multilatérale (on monte d’un degré dans la coopération) : les pays membres du SME s’engagent à remettre au FECOM 20 % de leurs réserves en or et en devises. Ce qui permet à cet organisme commun (multilatéral) d’aider directement un pays membre en difficulté.

En somme, le FECOM est une sorte de FMI au plan européen (mais attention, de même que le FMI, il n’est pas une banque centrale : il n’émet pas de monnaie).

 

* Chaque taux de change officiel est ajustable

Par réalisme, on admet le droit, pour un pays en grande difficulté, de recourir à la dévaluation : si un pays subit un déséquilibre chronique de la balance courante donc si sa monnaie se déprécie fortement, au delà de la marge autorisée et s’il ne peut ou ne veut régler le problème par un ajustement interne (par exemple, une politique de rigueur), il peut dévaluer sa monnaie (« ajustement externe »).

Symétriquement, en cas d’excédent courant chronique, il peut la réévaluer. On dit que les taux pivots sont « ajustables ».

Mais le système se veut coopératif en ce sens qu’une modification de la parité ne peut se faire qu’avec l’accord des autres membres du SME. En clair, l’adhésion au SME implique le refus de dévaluations fortement compétitives, de dévaluations « agressives », comme durant les années 1930.

 

 

Attention ! Pas de cours mardi 09 avril : je suis à Paris au jury de l'Agrégation.

Rendez-vous le 16 avril !