Aux Etats-Unis, Tocqueville découvre que la classe moyenne peut gérer une société démocratique : elle est constituée de petits entrepreneurs et de petits propriétaires comme en France mais aussi de salariés, découverte pour Tocqueville.

Pour Tocqueville, la société démocratique sera donc une société où les différences sociales seront de moins en moins marquées, et où chacun poursuivra ses intérêts particuliers et cherchera avant tout à assurer son bien-être personnel. Moins de très riches, moins de très pauvres et une vaste classe moyenne.

 

2) Des positions sociales ne sont plus systématiquement réservées aux mêmes personnes : la mobilité sociale est possible

La passion pour l’égalité pousse à la suppression des privilèges et de la transmission héréditaire du statut social (hérédité sociale propre à l’ancien régime aristocratique et à la stratification en ordre).

Avec 1789, les Hommes naissent libres et égaux en droit ; l’abolition des privilèges (nuit du 4 août 1789) rend les postes accessibles à tous indépendamment de leur origine et en fonction de leur mérite : la mobilité sociale est possible.

Si dans la société démocratique on rencontre à la fois l'égalité des conditions et les inégalités économiques, la première y fait accepter les secondes : c'est bien ce que Tocqueville a constaté lors de son voyage aux États-Unis et qu'il ne trouve pas dans la société française marquée par les notables qui recréent de fait les anciens ordres et bloquent la mobilité sociale : il faut attendre le dernier quart du XIX° siècle pour que la mobilité sociale devienne un peu plus importante.

 

2. Les effets pervers de l’égalisation des conditions : l’égalité risque de tuer la liberté et de générer le despotisme

A. L’égalitarisme, perversion de la passion pour l’égalité

Plus l'égalité progresse, plus les inégalités deviennent insupportables et, par conséquent, la lutte contre les inégalités se poursuit et entraîne le progrès continu de l'égalité.

« Pourquoi les droits féodaux étaient devenus plus odieux pour le peuple de France que partout ailleurs? ». La réponse est simple et paradoxale : parce qu'ils y étaient déjà largement allégés et assouplis. D'une manière générale, c'est lorsqu'un pouvoir despotique cherche à se libéraliser qu'il devient le plus vulnérable et qu'il doit s'attendre à des révoltes. Tout allégement d'un pouvoir fait entrevoir la possibilité de réclamer un allégement supplémentaire. C'est ce que l'on appelle la frustration relative. Le moment le plus dangereux pour les mauvais gouvernements est d’ordinaire celui où ils commencent à se réformer.

 

Cette passion pour l’égalité risque de devenir exclusive et pousser au despotisme en aliénant la liberté : « Je pense que les peuples démocratiques ont un goût naturel pour la liberté ; livrés à eux-mêmes, ils la cherchent, ils l’aiment, et ils ne voient qu’avec douleur qu’on les en écarte. Mais ils ont pour l’égalité une passion ardente, insatiable, éternelle, invincible ; ils veulent l’égalité dans la liberté, et, s’ils ne peuvent l’obtenir, ils la veulent encore dans l’esclavage. »

L’égalitarisme apparaît comme la perversion de l’égalité, la négation du travail et du talent.

 

B. Un excès d’individualisme, qui risque de mener à l’égoïsme

L’individualisme est lié à la valeur de liberté : il représente le souci de l’autonomie personnelle, de l’émancipation par rapport aux contraintes du groupe dans la société traditionnelle.

« L’individualisme est un sentiment réfléchi et paisible qui dispose chaque citoyen à s’isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l’écart avec sa famille et ses amis ; de telle sorte que, après s’être ainsi crée une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société elle-même. L’individualisme est d’origine démocratique, et il menace de se développer à mesure que les conditions s’égalisent

Il y a donc deux facettes à l’individualisme :

  • Le désir de bien-être matériel amenant à consacrer l’essentiel de son existence à l’amélioration de sa condition : c’est l’hédonisme.
  • Une attitude qui incite chaque individu à s’isoler de la masse de ses semblables et à se replier sur la sphère privée de l’existence (famille, amis) : c’est l’égoïsme.

 

C’est ce repli sur soi, sur la sphère privée, que craint Tocqueville : les individus ne se préoccupent plus alors du sort d’autrui dans une société marquée par l’indépendance de chacun et l’atomisation.

 

NB : en cours nous manipulons des exemples historiques et des situations actuelles variées. Ces dernières ne sont pas retranscrites ici.